mardi 17 juin 2008

c'est le dernier jour de soleil (part 2)

J’ai faim. Je vais acheter des aliments sans équilibre. Un sandwich assez cher parce c’est du jambon de pays et du pain de céréales. Et des pâtisseries diverses. Je ne mange pas tout, je laisse de la nourriture sur le banc et je sais qu’un clodo que j’ai repéré et un peu suivi va venir y faire son repas.
Je quitte le parc, je vais dans un cinéma et je demande si je peux acheter du pop corn. Je ne peux pas. Je dois acheter un billet. Je le prends, il coûte cher. Je ne vais jamais au cinéma. Je prends du pop corn salé et je sors le manger. Je regarde les gens passer et repasser, je vois ceux qui montent dans les taxis, je me suis assis sur un banc. Il y a l’université pas loin. Je n’aime pas cet endroit, c’est la réflexion que je me fais. Je n’aime pas cette place et je n’aime pas les étudiants. Je m’en vais. Je prends un bus, c’est très agréable de regarder par la fenêtre.
J’aime la chaleur des églises, il y fait frais. Je rentre dans une église et je m’assois sur une chaise pas solide du tout, au dernier rang. J’essaie d’avoir un rapport intime avec Dieu, je me dis qu’il est possible qu’une vérité me soit ainsi révélée, c’est tout à fait le moment et tout à fait l’endroit. Mais je n’y parviens pas. Pas du tout. Alors je m’en vais, sans faire le signe de croix. Et je blasphème intérieurement.
Dehors il y a des recruteurs de donateurs. Ce sont des jeunes qui accomplissent un job. Ils pensent que ça vaut mieux qu’un autre job à cause de la portée humanitaire, ou humaine tout simplement. La vérité c’est qu’ils ont juste postulé à un job trouvé sur Internet. Je le pense et je le dis à un des recruteurs qui m’a abordé. Il me répond que non, que ce qu’il fait est important, que c’est parce que les gens s’en foutent et ne pensent qu’à leurs petits problèmes de riches que le monde va mal. Que si tout le monde donnait ne serait-ce que dix euros (oui, c’est comme ça qu’ils comptent recruter les dons des chômeurs et des étudiants, en leur disant que même un peu d’argent prouvera la grandeur de leur âme), et bien on sauverait plein d’enfants de la famine, ou du sida, on aiderait vraiment la recherche qui ne trouve rien. Et si elle ne trouve rien, c’est parce que les gens ne donnent même pas dix euros. Je lui explique que les gens ne veulent plus être sollicités, qu’ils n’en peuvent plus de devoir payer pour être nés dans un pays où il faut deux rayons de supermarché pour installer toutes les marques de biscuits. Ils ne veulent plus culpabiliser de manger et d’être en bonne santé. Je lui dis tout ça. Je lui dis qu’il m’emmerde aussi, qu’il n’y a jamais réfléchi vraiment à la compassion, qu’il ne croit même pas à son discours de jeune. Il me traite d’égoïste, continue dans mon dos que c’est avec une mentalité comme ça que les gens votent à droite etc etc… je n’ai pas eu envie de préparer un bon discours, et je me fichais un peu de mes arguments pas bien menés. Je n’ai jamais été fort à l’oral. D’habitude, quand je vois un recruteur de donateur, je me mets à courir comme si j’étais pressé et personne ne m’arrête. Le soir, à la télé, il y a des recruteurs publicitaires qui nous disent à tous en même temps que l’eau est rare. Mais je ne me sens pas coupable, en tout cas pas comme les gens qui lavent leur voiture et arrosent des jardins inutiles.